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Page:Séché - Les Muses françaises, II, 1908.djvu/13

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LES


MUSES FRANÇAISES




ÉMILIE ARNAL




Mlle Émilie Arnal est née à Millau, en Aveyron.

Elle n’a publié jusqu’à ce jour qu’un volume de poésies : Vers les Sommets. Ce seul livre suffit à affirmer son talent. Les beaux vers y abondent. L’émotion du poète éclate en strophes graves, un peu mélancoliques, en méditations empreintes de beauté pensive, de noblesse faite à la fois de stoïcisme sans orgueil et de calme résignation. Il semble que l’auteur ait une préférence marquée pour les poètes philosophiques et qu’elle voue un culte presque exclusif au génie de Vigny et de Sully-Prudhomme. N’est-ce pas à la mémoire de ce dernier que l’auteur de Vers les sommets dédie pieusement son recueil ? Les épigraphes et surtout le tour général de la pensée achèvent de nous convaincre. Ces influences expliquent peut-être cette sorte de dogmatisme qui donne çà et là un peu de sécheresse à l’émotion, et qui, parfois, souligne l’idée d’un rigorisme d’expression qui la dépare d’un inutile prosaïsme. Mais ce sont là remarques secondaires, d’importance minime. Beaucoup de poèmes, en effet, abondants, francs, d’une incontestable grâce, réduisent la portée d’une telle observation.

Des citations critiques que l’on pourrait donner du livre de Mlle Arnal, retenons seulement celle-ci, de M. Auguste Dorchain. Elle semble de tout point synthétique :

« On devine qu’elle n’est plus une adolescente, que sa jeunesse a déjà beaucoup pensé, beaucoup lutté, qu’elle a regardé la vie avec des yeux lucides et non à travers la vague illusion de celles qui ont eu tout le loisir de rêver en paix sans avoir jamais à confronter la réalité et le rêve. Dans cette confrontation, la vie lui est apparue d’autant plus digne d’être vécue qu’il y avait plus d’obstacles à vaincre pour la vivre dignement. Aussi point de rêverie imprécise : une claire aspiration vers un très noble idéal fait d’amour s’il se peut, fait de renoncement s’il le faut ; une espérance inquiète, mais fervente ; une volonté généreuse ; une tendresse délicate enfin, et sans égoïsme, à laquelle il serait plus doux encore de donner que de recevoir. »