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Page:Sand - Antonia.djvu/139

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comme pour chercher protection au cas où la crise se tournerait contre elle-même. Il lui sembla entendre comme un frémissement dans l’épais feuillage qui enveloppait le banc, et, bien que ce ne fût peut-être que le sautillement d’un oiseau dans les branches, elle se sentit vaguement rassurée.

— Non, mon voisin, reprit-elle avec une courageuse douceur : vous ne me ferez pas croire que vous soyez un méchant homme, et vous ne ferez rien de méchant contre personne. Vous vous en prendrez à moi seule, dans les limites de votre droit. Vous me gronderez… et j’accepterai la remontrance. Je vous promettrai ce que je me suis déjà promis à moi-même, de ne remettre jamais les pieds dans ce pavillon. Que puis-je faire de plus ? Voyons, parlez.

En ce moment, le feuillage s’agita un peu plus, et le moineau apprivoisé de Julien vint se poser sur l’épaule de madame d’Estrelle, comme un messager dépêché par lui pour lui demander grâce. Elle fut émue de cette petite circonstance plus qu’elle ne voulut se l’avouer, et elle prit dans le creux de sa main avec une sorte de tendresse la bestiole, déjà familiarisée avec elle.

Hum ! fit M. Antoine, dont les yeux perçants semblaient armés de divination : vous avez là une drôle de compagnie ! C’est à vous, ça ?

— Oui, répondit Julie, qui redoutait quelque vengeance contre Julien.

— Un moineau franc ! Vilaine bête ! ça ne fait que