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Page:Sand - Antonia.djvu/143

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eu ce travers-là, et, à l’âge que j’ai, je ne suis pas ridicule. Je ne veux qu’être votre père par contrat et trouver dans le mariage un moyen de vous choisir pour mon héritière. Allons, c’est assez parler. Il faut me dire oui ou non, car je ne suis pas d’un caractère à rester dans le doute, et je ne veux pas être humilié, entendez-vous ?

M. Antoine parlait d’un ton d’autorité singulière : Julie craignit qu’un refus ne l’exaspérât.

— Vous allez trop vite, lui dit-elle ; je suis, moi, précisément d’un caractère indécis et timide. Il faut me laisser le temps de la réflexion.

— Alors… vous ne dites pas non ? reprit le vieillard, évidemment flatté de l’espérance qui lui était laissée.

— Je ne dis rien, répondit madame d’Estrelle, qui s’était levée et se rapprochait de son hôtel avec anxiété. Vous me voyez toute bouleversée d’une offre à laquelle je ne m’attendais pas. Donnez-moi quelques jours pour y penser, pour me consulter… Vrai, je suis très-émue, très-touchée de votre amitié et aussi très-effrayée, car je m’étais juré de rester libre ! Adieu, monsieur Thierry, laissez-moi ! J’ai vraiment besoin d’être seule avec ma conscience, et je ne veux pas que vous cherchiez à la surprendre par vos bontés.

Julie s’échappa, et l’oncle Antoine sortit, oubliant le pavillon, le tableau, le lis, oubliant toute chose, et en proie à une fièvre d’espérance qui le faisait extravaguer plus que jamais ; mais, quand il se trouva dans