Page:Sand - Antonia.djvu/203

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quement les chevaux, et l’un d’eux ouvrit la portière, car le malicieux cocher criait à tue-tête :

— Au secours ! c’est un malfaiteur qui enlève une religieuse !

— Voyons si elle en vaut la peine ! répondit le groupe à peu près d’une seule voix.

Avant que la portière fût ouverte, Julien était sur ses pieds et repoussait d’une manière énergique le plus empressé des curieux. Le jeune homme rudoyé mit l’épée à la main en le traitant de cuistre, et ses compagnons l’imitèrent. Julien ne prit pas le temps de tirer la sienne. Il se préserva avec sa canne et s’en servit avec tant de sang-froid, d’adresse et de vigueur, qu’un des assaillants tomba et que les autres reculèrent. Julien, qui n’avait pas quitté le marchepied, profita de ce répit pour rentrer dans le fiacre et pour en faire sortir Julie par la portière opposée. Il la prit dans ses bras et l’entraîna à quelque distance. Là, il se retourna pour attendre ses adversaires ; mais, soit qu’ils eussent reçu quelque blessure grave, soit que l’approche du guet les eût dégrisés, ils s’éloignaient de leur côté le plus vite possible.

— Marchons, madame, dit Julien à madame d’Estrelle. Échappons aux curiosités de la police.

Julie marcha vite et bien. Si la peur l’avait paralysée un instant, la vue du danger auquel s’exposait son protecteur lui avait rendu l’énergie. Après quelques zigzags pour dérouter le guet, ils se trouvèrent en sûreté sur le nouveau cours, aujourd’hui le boule-