Aller au contenu

Page:Sand - Antonia.djvu/309

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

M. Antoine est instruit de votre refus d’observer celui qui vous concerne.

— Oh ! mon Dieu, dans quelle situation vous m’avez mise, Marcel ! Avec votre dévouement aveugle aux choses positives, avec votre entêtement de me sauver de la misère, vous m’avez avilie ! Cet homme croit que j’ai vendu mon cœur, qu’il l’a acheté de son argent, et Julien aussi croit que j’ai trahi l’amour pour la fortune ! Ah ! vous eussiez mieux fait de me tuer ! C’est aujourd’hui que je sens que tout cela est insupportable et qu’il faut mourir !

Julie sanglotait ; il y avait longtemps qu’elle ne pleurait plus. Marcel aimait mieux la voir ainsi que changée en statue, il espérait quelque chose d’une crise violente. Il la provoqua résolument.

— Grondez-moi, maudissez-moi, lui dit-il ; j’ai fait tout cela pour Julien !

— C’est vrai au fait, reprit Julie ; j’ai tort de vous le reprocher. Pardonnez-moi, mon ami. Vous êtes donc bien sûr que, si je blesse M. Antoine par mon refus, tout ce qu’il a fait pour Julien sera remis en question ?

— Indubitablement, et M. Antoine sera dans son droit aux yeux de l’équité. Il attend, avec une impatience qui commence à m’inquiéter, que vous proclamiez ses mérites et que vous ne rougissiez plus de ses bienfaits. Il faut boire ce calice, il faut le boire pour l’amour de Julien, si, comme je le suppose, cet amour n’est pas éteint !