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Page:Sand - Antonia.djvu/337

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et de l’amour fut si violent chez elle, qu’elle fît un cri d’horreur, et, se pressant contre lui de toute sa force :

— J’ai donné ma parole d’honneur de te quitter, dit-elle, et j’y manque, et je jette ta mère dans la misère ! Peux-tu me relever de cela ?

— Tu es folle ! dit Julien ; est-ce que ma mère était si pauvre quand tu l’as connue ? est-ce qu’on me coupera le bras droit pour m’empêcher de travailler ? Eh bien, je travaillerai du bras gauche ! Va, je comprends tout à présent. Ceci est la vengeance promise par M. Antoine ; j’aurais dû deviner plus tôt pourquoi la maison de mon père nous était rendue. Pauvre Julie, tu te sacrifiais pour nous ; mais tout cela est non avenu : je n’ai pas consenti, moi ; je n’ai rien accepté. J’ai subi sans rien savoir. Voyons, ne tremble plus, je te relève de ta parole, et malheur à qui viendra te la rappeler ! Si tu hésites, si tu crains quelque chose, je croirai que c’est la fortune que tu regrettes, et que tu as moins de courage et d’amour que moi !

— Ah ! voilà le soupçon que je craignais tant ! dit Julie. Partons, partons ; mais où irons-nous ? Comment oserai-je me présenter à ta mère en lui disant : « Je vous apporte la douleur et la ruine ? »

— Julie, tu doutes de ma mère, tu ne nous aimes plus !

— Partons ! reprit-elle, allons la trouver, et qu’elle décide de moi. Emmène-moi, emporte-moi d’ici !

Julie était brisée par tant d’émotions, que ses forces