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Page:Sand - Cadio.djvu/106

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souhaite une telle mort à ceux que j’aime, plutôt qu’une vie d’orages et de remords.

SAINT-GUELTAS. Ainsi, vous conseillez à Louise de me tenir à distance, comme si ce n’était pas assez des marches et contre-marches de la guerre pour nous séparer chaque jour et pour retarder indéfiniment l’expansion de nos cœurs ? Tenez, ma belle enfant, c’est puéril, cela, car je pourrais repousser le frêle obstacle de votre surveillance, prendre ma fiancée dans mes bras et l’emporter au fond des bois… Mais… savez-vous ce qui m’arrête ?

MARIE. Un reste d’honneur, j’imagine ?

SAINT-GUELTAS. Quelque chose de plus : la crainte de vous affliger.

MARIE. C’est toujours cela.

SAINT-GUELTAS. N’essayez pas de le prendre sur ce ton dégagé. Je ne suis pas un novice !

MARIE. Que voulez-vous dire ?

SAINT-GUELTAS. Vous me comprenez très-bien. Allons, charmante enfant, mon penchant répond au vôtre, ne soyez plus jalouse de Louise, aimons-nous ! Ah ! vous restez stupéfaite ? C’est bien joué ; mais à quoi bon ces attitudes convenues ? C’est du temps perdu. Voulez-vous être sincère ? Quittez l’armée, je vous ferai conduire à mon château de la Roche-Brûlée, et je vous y rejoindrai avant huit jours, car le conseil des chefs s’obstine à passer la Loire et à déplacer le siége de la guerre. Ce sera la perte de la Vendée, et je me séparerai de cette déroute pour rallier les forces de mon parti dans de nouvelles conditions.

MARIE. Et Louise… que deviendra-t-elle ?

SAINT-GUELTAS. Elle épousera son cousin Sauvières,