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Page:Sand - Cadio.djvu/278

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(Roxane, effrayée, recule au fond du salon. Louise va ouvrir avec résolution la porte de sa chambre, et regarde comme pétrifiée.)

LOUISE. Ah ! je n’avais pas tout vu ! Il y a un enfant mort étendu sur le sofa ! Non, il se lève, mais c’est un cadavre qui marche ! Il paraît insensé comme sa mère… et il ressemble à… Oui, c’est cela ! La vision se complète, cette misérable, cette folle, ce sera moi, et cet enfant mourant ou idiot, ce sera le mien !

ROXANE, se cachant la figure. Ton enfant ? quel enfant ? qu’est-ce que tu dis ? Ah ! tu es malade, tu rêves…

LOUISE. Voyez vous-même ! Si vous ne voyez rien, c’est que je suis folle en effet ! Ayez le courage de regarder. Tenez, ils viennent, ils marchent, ils entrent ici. (Les deux spectres que Louise vient de décrire s’avancent en se tenant par la main et en riant d’une manière fantasque. Ils traversent le salon et sortent par la porte vitrée qui donne sur le balcon. Louise s’évanouit. Roxane se pend à la sonnette en criant au secours.)



Scène III. — Les Mêmes, LA KORIGANE, qui a tardé à venir et qui entre par la chambre de Louise. Elle est pâle, essoufflée vêtue d’un riche costume breton.


ROXANE. Ah ! j’en étais bien sûre, que c’était toi… Sotte que tu es, tu nous as fait une peur…

LA KORIGANE. Oui, oui, c’était moi, mademoiselle Louise ! Remettez-vous. C’était moi !…

LOUISE, égarée. Toi ?… Mais l’enfant…

ROXANE. Il y avait un enfant ? tu es sûre ? Je n’ai rien vu, moi ; j’ai fermé les yeux.

LA KORIGANE, à Louise. C’est des rêves que vous avez. Ah ! vous avez peur ici… Vous ne vous y plaisez pas !