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Page:Sand - Cadio.djvu/77

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qui n’était pas si mauvais qu’on veut bien le dire ! Hein, ai-je tort ?

HENRI. Mon ami Rebec, je vois que tu n’as pas changé.

REBEC. Il faut bien plier sous les circonstances ; mais, au fond, monsieur Henri, je suis toujours aussi bien pensant… et aussi…

HENRI. Et aussi bête que par le passé.

REBEC. Plaît-il ?

HENRI. Tu as très-bien entendu, mon cher, et tu es stupide de croire qu’un ci-devant noble ne peut pas servir fidèlement son pays.

REBEC. Je ne dis pas ça ! au contraire ! Je vois bien que vous détestez le mensonge, et, entre nous, monsieur votre oncle a manqué à son devoir en trahissant lâchement…

HENRI. Tais-toi ! Ne répète jamais ce mot-là devant moi, si tu tiens à tes deux oreilles. Mon oncle a cru obéir à sa conscience. Il s’est trompé, mais comme se trompe un galant homme, en se sacrifiant. Il savait que la Vendée n’aboutirait qu’à un gâchis et à un désastre. Il s’y fera tuer et laissera quand même une mémoire pure. Moi, je me ferai éventrer aussi pour dompter la révolte, et peut-être recevrai-je mon affaire de la main d’un de mes paysans ou d’un des vieux domestiques qui m’ont porté dans leurs bras et fait manger la bouillie ! ou bien ce sera le prêtre qui m’a fait faire ma première communion, qui me cassera la mâchoire, ou encore… mon oncle lui-même, le plus doux, le plus tendre, le meilleur des hommes ! C’est comme ça, à ce qu’il paraît, la guerre civile. C’est très-gentil ! mais, quand on y est, on y est, et, quand on va au feu, ce n’est pas pour recevoir des