Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/174

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perdre l’affection de mon père, la faute en est à moi, à moi seule. Je ne vous ai pas compris, je vous ai mal jugé. Je me suis méfiée de vous. Vos torts sont mon ouvrage, je vous ai exaspéré, égaré, jeté dans une sorte de délire. J’aurais dû vous dire dès le premier jour ce que je vous dis maintenant : Mon ami, plaignez-moi, je suis malheureuse ; soyez bon, ayez pitié de moi !

En parlant ainsi avec une émotion qui la rendait plus belle que jamais, Césarine se plia et se pencha comme si elle allait s’agenouiller devant M. de Rivonnière. Celui-ci, éperdu et comme désespéré, l’en empêcha en s’écriant :

— Que faites-vous là ? C’est vous qui êtes folle et cruelle ! Vous voulez donc me tuer ? Que me demandez-vous, qu’exigez-vous de moi ? Ai-je compris ? Je croyais à un caprice, vous me dites pour me consoler que c’est une passion ! et vous voulez… Mon Dieu, mon Dieu, qu’est-ce que vous voulez ?

— Ce que votre cœur et votre conscience vous crient, mon ami, répondit-elle, toujours penchée vers lui et retenant ses mains tremblantes dans les siennes ; je veux que vous me pardonniez mon manque d’estime, mon ingratitude, mon silence. Quand vous m’avez dit : « Avouez votre amour pour un autre, je reste votre ami, » — car vous m’avez dit cela ! j’aurais dû vous croire ; c’est votre droiture, c’est votre honneur qui parlait spontanément. J’ai cru à un piège, c’est là mon crime et la cause de votre colère. Ma méfiance vous a trompé. Vous avez cru à