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Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/195

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mène et vous ramène, le marquis me l’a dit. Si quelque jour Paul se brouille avec toi, — ça peut arriver, tu le tracasses beaucoup quelquefois, — eh bien ! tu iras vivre en bonne fermière à la campagne avec ton fils, qu’il te laissera emmener pour son bonheur et sa santé. Je suppose d’ailleurs que ce pauvre Paul, qui se fatigue et se prive pour nous donner le nécessaire, meure à la peine : que deviendras-tu avec ton enfant ? Vivras-tu des aumônes de sa tante et de mademoiselle Dietrich ? Ces bontés-là n’ont qu’un temps. Tu sais bien que le travail de deux femmes ne nous suffit pas pour élever un jeune homme de famille. Ton Pierre sera donc un ouvrier, sachant à peine lire et écrire ? Avec ça qu’ils sont heureux, les ouvriers, avec leurs grèves, leurs patrons et les soldats ! Pierre est un enfant bien né ; il est petit-fils d’un médecin et noble par sa grand’mère. Tu lui dois d’en faire un bourgeois et de pouvoir lui payer le collège ; autrement il te reprocherait son malheur.

— Mais s’il me reproche son bonheur ?…

— Est-ce qu’il saura d’où il vient ? les enfants ne fouillent jamais ces choses-là. Ils prennent le bonheur où ils le trouvent, et on doit sacrifier sa fierté à leurs intérêts.

Marguerite signa ; la Féron s’enfuit sans lui donner le temps de la réflexion.

Le marquis n’avait pas compté que Paul pourrait ignorer longtemps ce contrat, qu’il courut déposer chez son notaire, et qu’il lui recommanda de régulariser au plus vite. Il connaissait Marguerite, il la savait