Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/207

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courut à la sonnette, demanda sa voiture, et nous partîmes sans échanger une parole.

Le marquis était, quand nous arrivâmes, entre les mains du chirurgien, qui, assisté de Paul et du vicomte de Valbonne, opérait l’extraction de la balle. Dubois, qui nous attendait à la porte de l’hôtel, nous fit entrer dans un salon, où le jeune Latour me raconta tout ce qui avait amené et précédé le duel.

— J’étais fort inquiet, me dit-il, bien que Paul se fût exercé depuis longtemps à se servir du pistolet et de l’épée. Il m’avait dit souvent :

» — J’aurai probablement un homme à tuer dans ma vie, s’il n’est pas déjà mort.

» Je savais qu’il faisait allusion au premier amant de sa maîtresse, car j’avais été son confident dès le début de leur liaison. Je lui avais mainte fois conseillé de l’épouser quand même, à cause de l’enfant, qu’il aime avec passion. C’est du reste la seule passion que je lui aie jamais connue. Aussi c’est pour son fils, bien plus que pour la mère et pour lui-même, qu’il s’est battu. Il avait été réglé qu’il tirerait le premier. Il a visé vite et bien. Il ne prend jamais de demi-mesure quand il a résolu d’agir : mais, quand il a vu son adversaire étendu par terre et lui tendant la main, il est redevenu homme et s’est élancé vers lui les bras ouverts.

— » Vous m’avez tué, lui a dit le blessé, vous avez fait votre devoir. Vous êtes un galant homme, je suis le coupable, j’expie !

» Depuis ce moment, Paul ne l’a pas quitté. Il m’a