Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/39

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couché tard, les valets dormaient encore, et les appartements étaient restés en désordre. M. Dietrich, qui avait conservé les habitudes de simplicité de sa jeunesse, n’éveilla personne ; mais, avant de gagner sa chambre, il voulut se rendre compte par lui-même du tardif réveil de ses gens, et il entra dans le petit salon où la danse avait commencé. Elle y avait laissé peu de traces, vu que, s’y trouvant trop à l’étroit, on avait fait invasion, tout en sautant et pirouettant, dans la grande salle des fêtes. On y avait allumé à la hâte des lustres encore garnis des bougies à demi consumées qui avaient éclairé les derniers bals donnés par madame Dietrich. Elles avaient vite brûlé jusqu’à faire éclater les bobèches, ce qui avait été cause d’un départ précipité : des voiles et des écharpes avaient été oubliés, des cristaux et des porcelaines où l’on avait servi des glaces et des friandises étaient encore sur les consoles. C’était l’aspect d’une orgie d’enfants, une débauche de sucreries, avec des enlacements de traces de petits pieds affolés sur les parquets poudreux. M. Dietrich eut le cœur serré, et, dans un mouvement d’indignation et de chagrin, il vint écouter à ma porte si j’étais levée. Je l’étais en effet ; je reconnus son pas, je sortis avec lui dans la galerie, m’attendant à des reproches.

Il n’osa m’en faire :

— Je vois, me dit-il avec une colère contenue, que vous n’avez pas pris part à des folies que vous n’avez pu empêcher…

— Pardon, lui dis-je, je n’ai eu aucune velléité