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Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/47

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comme un homme qui échappe à l’anxiété de l’irrésolution. Je veux abdiquer entre vos mains pour élever une femme, il faut une femme.

En effet, depuis ce jour, il se fit en lui un notable changement. Il cessa de contrarier systématiquement les tendances de sa fille, et je m’applaudis de ce résultat, que je croyais le meilleur possible. Me trompais-je ? N’étais-je pas à mon insu la complice de Césarine pour écarter l’obstacle qui limitait son pouvoir ? M. Dietrich avait-il pénétré dans le vrai de la situation en me disant que j’étais charmée, fascinée, enchaînée par mon élève ?

Si j’ai eu cette faiblesse, c’est un malheur que de graves chagrins m’ont fait expier plus tard. Je croyais sincèrement prendre la bonne voie et apporter du bonheur en modifiant l’obstination du père au profit de sa fille ; ce profit, je le croyais tout moral et intellectuel, car, je n’en pouvais plus douter, on ne pouvait diriger Césarine qu’en lui mettant dans les mains le gouvernail de sa destinée, sauf à veiller sur les dangers qu’elle ignorait, qu’elle croyait fictifs, et qu’il faudrait éloigner ou atténuer à son insu.

L’hiver s’écoula sans autres émotions. Ces dames reçurent leurs amis et ne s’ennuyèrent pas ; Césarine, avec beaucoup de tact et de grâce, sut contenir la gaieté lorsqu’elle menaçait d’arriver aux oreilles de son père, qui se retirait de bonne heure, mais qui, disait-elle, ne dormait jamais des deux yeux à la fois.

Il faut que je dise un mot de la société intime des demoiselles Dietrich. C’étaient d’abord trois autres