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Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/189

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L’abbé avait choisi. La société de Frumence était tout pour lui. Frumence avait rompu avec toute pensée d’avenir tant que vivrait son ami, et ce qu’il voyait au delà, c’était une consécration du même genre à un autre être, celui qu’il en jugerait digne.

Son existence ainsi simplifiée, il était parfaitement calme et se livrait à l’étude joyeusement. Le traitement du curé fournissait le pain quotidien. Dans ce pays et à cette époque, on vivait avec quelques sous par jour. Six heures de travail manuel chez Pachouquin procuraient quelques autres sous qui suffisaient à l’entretien du vêtement. La cure s’écroulait bien un peu, Frumence faisait du mortier, cassait des pierres et réparait lui-même. L’oncle avait une bibliothèque, et, quant aux livres nouveaux, on avait à Toulon quelques amis qui en prêtaient assez pour que l’on pût se mettre au courant des publications intéressantes. On n’y tenait d’ailleurs pas essentiellement, au presbytère des Pommets ! On aimait tant les anciens, qu’on n’admettait guère l’idée du progrès. On était persuadé que l’esprit de l’homme repasse toujours par les mêmes phases, et, comme cela est vrai jusqu’à un certain point, on croyait plus à la roue qui tourne sur elle-même qu’à la roue qui avance en tournant : cette vérité qui se répand aujourd’hui était