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Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/213

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plus sain. Il est dans tout, cet aliment à mon usage, il mûrit sur tous les arbres. Avec un peu de savoir bien humble, on apprend à cueillir le meilleur, et dès lors les désespoirs romanesques, les prétendues tortures de l’âme vous font l’effet d’appétits dépravés ou de digestions laborieuses.

Frumence parlait avec tant de conviction, que je crus devoir lui tout dire pour me débarrasser d’un grand trouble. Je lui présentai la fameuse page en lui demandant avec un peu de malice si c’était la traduction de quelque texte d’un livre nouveau.

— Ce doit être une traduction ou un extrait, dit-il en parcourant l’écrit des yeux.

Mais il rougit tout à coup en voyant qu’il s’était nommé à ce passage : Et pourtant tu n’es pas poëte, Frumence, tu ne crois pas en Dieu, toi !

— Voilà donc, reprit-il en surmontant un embarras mêlé de contrariété, ce qui vous a scandalisée ? Eh bien, n’en parlons plus, n’en parlons jamais. C’est un tort d’écrire pour soi ce qu’on ne voudrait lire à personne. Ceci ne se renouvellera pas.

Il jeta sa page dans le fond de la cheminée après l’avoir roulée en boule dans ses mains, et, reprenant sa tranquillité, il voulut me parler d’histoire ancienne ; mais j’étais décidée à le confesser. Je