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Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/260

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hommes ne tiennent pas grand compte. Ils sont portés à trouver dédaigneuse et fantasque celle qui, sans avoir rien à leur reprocher, n’éprouve pas pour eux une sympathie soudaine. Moins difficiles que nous parce qu’ils savent qu’ils seront toujours nos maîtres, pour peu qu’ils aient quelques avantages personnels ou sociaux, ils pensent nous faire honneur en nous offrant leur protection. Nous qui savons qu’il faudra, en étant à eux, cesser d’être à nous-mêmes et à nos parents, nous avons grand’peur de cet étranger qui vient nous acheter et qui bien souvent nous marchande. Le désir et la curiosité de l’enfance font plus de mariages que le discernement. À quinze ans, on fait peu d’objections ; à vingt ans, on s’épouvante, et j’avais déjà cet âge-là quand les propositions devinrent sérieuses.

Je dois dire, au reste, qu’elles furent en petit nombre. Quelque réservée que je fusse, ma réputation de fille savante, très-raillée et très-incriminée par madame Capeforte et les siens, très-vantée et très-exagérée par M. Barthez et par ses amis, éloigna beaucoup les prétendants. Dans notre province, on est un peu barbare ; on a beaucoup de préjugés, de l’esprit et de l’imagination certainement, mais peu de culture et des mœurs rudes. Ensuite, j’appris indirectement et peu à peu que