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Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/83

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dans les buissons voisins l’osyris alba, la jolie aphyllante, diverses sortes d’hélianthèmes, la glaucée, et sur les rochers, le gypsophile blanc et vingt autres plantes méridionales que je connaissais déjà. J’ai gardé cet herbier, et je pourrais les nommer toutes ; mais cela n’avancerait pas mon récit et ne servirait qu’à me rappeler une des journées les plus mystérieuses de mon enfance.

Quand le précepteur m’eut initié à cette petite flore alpestre, il m’engagea à me reposer. Je me couchai sur l’herbe à quelque distance de Marius, qui ronflait depuis longtemps, et je fis mon possible pour dormir un peu, sans en venir à bout. J’écoutais machinalement, sans curiosité aucune, et sans y prendre d’abord aucun intérêt, la conversation que Denise avait avec Frumence à quelques pas de moi. Comme j’avais couvert ma figure pour me préserver des insectes et du soleil, ils crurent que je dormais, et, quand je les écoutai avidement, je me tins tranquille pour les maintenir dans cette croyance. Je prends le dialogue au moment où il me parut bizarre. C’est Denise qui parlait d’une voix sourde et comme tremblante.

— Ah ! vous enragez, monsieur Frumence ; je vois bien que vous enragez !

— Pourquoi donc ça, mademoiselle Denise ?

— Parce que sa figure est cachée et que vous ne