Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/123

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fortune. Blanche retourna chez elle pleine de joie, après avoir supplié Diane de revenir la voir.

Mais Diane n’avait plus rien à faire au château de Pictordu. Elle ne souhaitait point le posséder matériellement. Elle le possédait dans sa mémoire comme une vision chère et sacrée qui lui apparaissait quand elle voulait. La fée qui l’y avait accueillie l’avait quitté pour la suivre, et cette inspiratrice demeurait à présent avec elle, pour toujours et en quelque lieu qu’elle se transportât. Elle lui bâtissait des châteaux sans nombre, des palais remplis de merveilles, elle lui donnait tout ce qu’elle pouvait souhaiter, la montagne comme la forêt et la rivière, les étoiles du ciel comme les fleurs et les oiseaux. Tout riait et chantait dans son âme, tout étincelait devant ses jeux quand, après un sérieux travail, elle sentait qu’elle avait réalisé un progrès et fait un pas de plus dans son art.

Ai-je besoin de vous dire le reste de son existence ? Vous le devinez bien, mes enfants, ce fut une existence très-noble, très-heureuse et très-féconde en ouvrages exquis. Diane, à vingt-cinq ans, épousa le neveu du docteur, cet excellent frère d’adoption qui était un homme de mérite et qui n’avait jamais songé qu’à elle. Elle se trouva donc riche et put faire beaucoup de bien ; entre autres, elle fonda un atelier de jeunes filles pauvres, qu’elle forma elle-même gratis. Elle fit avec son mari les beaux voyages qu’elle avait rêvés et revint toujours avec bonheur retrouver son pays, son vieux ami, son père, et même sa belle-mère, qu’elle était arrivée à ai-