Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/234

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marchant sur le rivage et se dirigeant de son côté ; mais il se rassura bien vite en voyant que c’était un homme fait comme les autres, et même il lui sembla reconnaître son frère aîné François, celui qui, la veille, avait montré le poing au tailleur, car François détestait le tailleur et chérissait son petit Clopinet.

C’était lui, c’était bien lui, et Clopinet courut à sa rencontre pour se jeter dans ses bras. — Et d’où viens-tu, d’où sors-tu ? s’écria François en l’embrassant. Il n’est que sept heures du matin ; tu ne viens pas de Dives. Où donc as-tu passé la nuit ?

— Là, sur cette grosse pierre noire, dit Clopinet.

— Comment ! sur la Grosse-Vache ?

— Ce n’est pas une vache, mon François, c’est une pierre pour de vrai.

— Eh ! je le sais bien ! Toi, tu ne sais pas qu’on appelle ces pierres-là les Vaches-Noires ? Mais pendant la marée où étais-tu ?

— Je ne sais point ce que tu veux dire.

— La mer qui monte jusqu’ici, jusqu’à ces pierres qu’on appelle les Vaches-Blanches ?

— Ah ! oui, j’ai vu cela, mais les esprits de la mer m’ont empêché de me noyer.

— Il ne faut pas dire de folies, Clopinet ! il n’y a pas d’esprits sur la mer ; sur la terre, je ne dis pas…

— Qu’ils soient de la terre ou de la mer, reprit Clopinet vivement, je te dis qu’ils m’ont porté secours.

— Tu les as vus ?