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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 2.djvu/102

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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

j’aimerais mieux écouter pérorer Schœlcher que d’enseigner une chose que je fais si mal pour mon compte et que d’avoir un écolier doué d’aussi heureuses dispositions.

Laissons Mallefille et sa lettre. Je lui déclare bien que jamais je ne lui donnerai de place dans les miennes pour lui insérer quoi que ce soit de son cru, vers ou prose, français ou chinois. Revenons à la vôtre, qui est tout à fait bonne et tendre, mon cher Fellow, et qui me donne une nouvelle preuve très inutile, mais très douce, de votre amitié. Si j’avais pu prévoir que ma lettre pût vous affliger, j’en aurais bien fait ce qu’on devrait faire de toutes celles de Mallefille. En vérité, vous avez attaché trop d’importance à ce projet de vous écrire moins souvent. Était-ce donc à l’état de résolution pour l’avenir, ou n’était-ce pas plutôt à l’état d’excuse pour le passé ? Je n’en sais rien ; mais, quoi qu’il en soit et quoi qu’il en ait été, il suffirait que le ralentissement de ma correspondance avec Marie lui causât le moindre chagrin ou le moindre regret pour que toute ma paresse fût dissipée en un clin d’œil et pour que je lui écrivisse tous les jours si elle le voulait. Jamais aucune tristesse ne lui viendra de moi par ma faute, je l’espère. Si cela arrivait, il faudrait qu’elle fît ce qu’il y a toujours de mieux à faire en pareil cas : s’expliquer pour le présent et pardonner pour le passé. Voilà tout ce que je puis répondre à votre lettre, que je ne comprends pas bien, à cause de mon peu de mémoire, mais qui me touche infiniment,