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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 2.djvu/35

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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

tiennent-ils toujours ? Je fais approprier ma chambre le mieux possible pour y loger Marie. Jamais je n’ai eu tant le souci de la propriété. Je m’aperçois de mille inconvénients qui ne m’avaient jamais frappée. Je crains que les appartements ne soient froids et incommodes. Je fais faire des rideaux, chose inconnue dans ma chambre jusqu’à ce jour. Si j’avais le temps, je ferais bâtir une aile à mon castel. Je suis aussi grognon envers les ouvriers que le marquis de Morand. Enfin mes amis me demandent si j’ai attrapé quelque maladie en Suisse pour prendre tant de soins et de précautions.

Avec tout cela, j’ai une peur affreuse que ma belle comtesse ne se croie ici dans un champ de Cosaques. J’ai déjà essayé de l’y installer en peinture, et je regarde à chaque instant le portrait, pour voir s’il ne bâille pas et s’il ne s’enrhume pas. N’allez pas me donner tous ces tourments pour rien, mes bons amis ; que j’en sois au moins récompensée par votre présence. Je ne puis promettre à Marie qu’elle sera contente de mon domicile et de mon rustre entourage ; mais elle sera contente de mon zèle, de mon assiduité et du dévouement absolu de moi et de tous les miens.

Venez donc bientôt, Fellows ! Les Piffoels comptent sur vous.

Moi, je suis un peu spleenétique. Je ne sais pas trop pourquoi. C’est peut-être parce que je n’ai pas d’argent.