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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 3.djvu/122

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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND


CCXCIII

À M. ARMAND BARBÈS, À BOURGES


Nohant, 14 mars 1849.


Cher ami,

J’avais reçu votre lettre du mois de décembre. N’en soyez point inquiet. Si je ne vous ai pas écrit depuis, c’est que j’espérais aller à Paris, et j’aurais bien préféré vous voir ; mais je n’ai pu quitter mon île de Robinson. En outre, malgré cette apparence de sérénité dont on doit l’exemple ou la consolation à ceux qu’on aime et qui vous voient de près, j’ai été sous le coup d’un accablement physique et moral que je n’aurais pu vous cacher en vous écrivant.

J’ai eu ensuite la volonté d’aller à Bourges, et j’ai eu à subir des luttes domestiques pour ne pas le faire. Je n’ai cédé que devant cette considération que tous s’accordaient à me présenter : « Vous êtes, me disait-on, la bête noire, le bouc émissaire du socialisme. On veut que vous conspiriez sans cesse, et plus vous vous tenez coite, plus on vous accuse. Si vous allez à Bourges, on cherchera tous les moyens de vous vexer. » À quoi je répondais que cela m’était bien égal ; mais on ajoutait aussitôt que « la malveillance de cer-