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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 6.djvu/291

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DCCCXCVI

À M. CHARLES-EDMOND, À PARIS


Nohant, 6 juin 1873.


Je ne suis pas morte, car j’ai appris avec une vraie joie que vous alliez enfin mieux, cher ami. Mais j’ai été absolument idiote depuis que nous nous sommes quittés. J’ai fait de la tapisserie et point de littérature.

Je ne suis pas malade, je ne souffre de rien, mais je suis faible à ne pouvoir faire dix pas sans être écrasée de fatigue, et le seul remède à ces accès d’anémie, c’est, pour moi, de ne penser à rien avec suite et de rêver sans but. Je ne peux même pas penser à mon roman sans que la sueur me vienne au front. Je vous donnerais bien pour titre un des noms des principaux personnages ; mais ce serait m’engager à finir ce roman-là, tandis que je ne suis pas sûre de ne pas le prendre en horreur quand il s’agira de s’y remettre.

Donnez-moi encore une quinzaine pour revenir à la vie.

Voilà, j’espère, que vous marchez tout à fait et que vous allez aussi vous reprendre. Dites à votre femme et à Loulou toutes mes tendresses. Aurore m’a fait beaucoup de questions sur cette fillette et a été enchantée d’apprendre qu’elle était jolie et bonne comme un ange.