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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 6.djvu/80

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m’aviez indiquée. Mais, si ma lettre met autant de temps que la première, vous recevrez celle-ci auparavant. Nous sommes sous le coup de la reddition de Paris, nouvelle concise que nous avons reçue il y a deux jours et depuis laquelle aucun détail ne nous a été communiqué. Nous ne pensions pas que le dénouement fût si proche ; mais nous sommes bien sûrs qu’il ne pourrait être retardé, car tout ce qui est sage et humain a confiance en Jules Favre. Une autre fraction de l’opinion l’accuse, et croit que nous étions en état de continuer la guerre à outrance. Cela je n’en sais rien. Je vous l’ai déjà écrit, parce qu’il y a autant de raisons pour le croire que pour le nier dans les choses que nous savons, et parce que, dans le pays isolé où nous sommes, nous ne savons guère que les faits accomplis et jugés. Mais, à vous, Américain, je peux bien parler par-dessus la politique, c’est-à-dire au point de vue social et historique. Fussions-nous vainqueurs, cette guerre à mort tuera l’avenir de l’Europe, et je sens que la paix est comme une volonté de Dieu qu’il faut savoir accepter. Si elle nous diminue dans le sens de la force matérielle, elle nous laisse toute notre valeur dans le sens moral. Voilà ce qu’une âme droite peut penser, ce qu’une bouche sans fiel peut dire sans crainte. La paix est désirable pour tous. Elle est un devoir, et les préoccupations pour la forme du gouvernement doivent venir après.

Quel sera-t-il ? La majorité n’est pas républicaine,