Page:Sand - Francia.djvu/221

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pour maîtresse malgré cela ! il en rit avec son autre maîtresse, qui ne vaut pas mieux que lui. »

Francia se leva dans un transport d’indignation. Elle eut chaud tout à coup ; cette chaleur dévorante se portait surtout à la tête, et il lui sembla qu’une lueur rouge remplissait la chambre. Elle tira le poignard, elle essuya la lame sans savoir ce qu’elle faisait.

— À présent, pensait-elle, je vais mourir ; mais je ne veux pas mourir déshonorée. Je ne veux pas qu’on dise : Elle a été la maîtresse du Russe qui a tué sa mère, et elle l’aimait tant, cette misérable, qu’elle s’est tuée pour lui. J’ai si peu vécu ! Je ne veux pas avoir vécu pour ne faire que le mal et pour amasser de la honte sur ma mémoire. Je veux qu’on me pardonne, qu’on m’estime encore quand je ne serai plus là. Je veux qu’on dise à mon frère :

« — Elle avait fait une lâcheté, elle l’a bien lavée, et tu peux être fier d’elle, tu peux la pleurer. Toi, qui voulais tuer des Russes, tu n’as pas trouvé l’occasion, elle l’a bien trouvée, elle ! Elle a vengé votre mère ! »