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Page:Sand - Jean Ziska, 1867.djvu/54

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jean ziska.

pèlerins, afin qu’ils eussent à se tenir sur leurs gardes, et ils s’envoyèrent les uns aux autres des chariots avec des gens bien armés. Mais avant que ces troupes eurent pu opérer leur jonction, elles furent attaquées par les Impériaux, ayant à leur tête Sternberg, seigneur catholique, président de la monnaie de Cuttemberg. Ceux d’Aust furent taillés en pièces ; mais ceux de Knim repoussèrent Sternberg, et le forcèrent à la fuite, après quoi ils restèrent tout le jour sur le lieu du combat, enterrant les morts d’Aust et faisant dire l’office divin par leurs prêtres. De là ils se rendirent à Prague en chantant des hymnes de victoire, et ils y furent joyeusement reçus par leurs frères.

À cette occasion, Ziska écrivit une fort belle lettre ceux de Tauss[1], dans le district de Pilsen. Nous la rapporterons, parce que ces pièces précieuses nous font connaître les caractères historiques mieux que toutes les déclamations des écrivains. On a retrouvé celle-ci en 1541, dans la maison de ville de Prague.

« Au vaillant capitaine et à toute la ville de Tista.

  1. Tauss, Taus, Tausch, Tysta ou Tusta, c’est la même ville, ou du moins le même nom. Il est impossible de trouver dans les historiens anciens un nom, même des plus importants, sur lesquels ils s’accordent. Il paraît qu’aujourd’hui encore l’orthographe germanisée des noms bohèmes n’offre guère plus de certitude. Je ne me pique d’une d’aucune exactitude pour ces noms sur lesquels rien n’a dû m’éclairer suffisamment. On sait l’indifférence de nos historiens français des derniers siècles, et le sans-gêne des corruptions de la basse-latinité du moyen âge pour les noms étrangers. Je croirais cependant que le véritable nom ancien de Tauss est Tusta, à cause d’une anecdote consignée dans plusieurs livres à ce sujet. La tradition rapporte qu’en 974 l’empereur Othon 1er, obligeant Boleslaws, prince de Bohême, à tenir une chaudière sur le feu pour avoir commis un fratricide, et ce prince voulant s’asseoir, l’empereur lui cria : Tu sta. La légende peut être fausse, mais elle est ancienne, et le jeu de mots porte sur un nom qui était accepté alors. Cette dissertation pédante est la seule que je me permettrai : on me la pardonnera. J’avais placé le château fantastique de Riesenburg près de Tauss, dans le roman de Consuelo.