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Page:Sand - La Daniella 1.djvu/316

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qu’en le frappant, tu l’as traité d’espion et que tu as injurié et maudit, en termes révolutionnaires, le gouvernement de l’Église. Il dit t’avoir reconnu, et il produit un témoin qui serait accouru trop tard pour le secourir, mais qui aurait entendu tes paroles et vu ta figure. Ce témoin n’a jamais été vu à Frascati, et pourtant la police paraît le connaître et a pris acte de sa déposition. On a été encore hier au soir à Piccolomini, probablement pour t’arrêter, et, ne te trouvant pas, on a fait ouvrir ta chambre pour s’emparer de tes papiers ; car on assure maintenant que tu es affilié à l’éternelle conspiration que l’on découvre toutes les semaines contre le pouvoir temporel du saint-père. Heureusement, ma tante avait prévu le cas : elle avait retiré de ta chambre tout tes effets, et jusqu’au moindre bout de papier chiffonné. Tout cela était bien caché dans la maison. Elle a dit que tu étais parti la veille pour Tivoli, à pied, avec ton attirail de peintre, et que tes autres effets étaient restés à Rome le jour de Pâques. Aussitôt qu’elle s’est vue débarrassée de ces inquisiteurs, elle est partie elle-même pour Rome, où elle va consulter lord B*** sur ce qu’il y a à faire pour te tirer de là. Il faut donc que tu attendes patiemment ici le résultat de ses démarches ; car de songer à voyager, de jour ou de nuit, sans tes passe-ports, qui sont à la police française à Rome, c’est impossible. Tu serais arrêté à la première ville, et, vouloir passer la frontière par les sentiers, comme font les brigands et les déserteurs, en supposant que je pusse te servir de guide, ce qui n’est pas, c’est mille fois plus pénible et plus dangereux que de rester ici, où, lors même qu’on te soupçonnerait d’y être, on ne se déciderait pas aisément à venir te prendre.

— Et pourquoi cela ?

— Parce que ceci est une ancienne résidence papale et qu’il y avait autrefois droit d’asile. Les Borghèse avaient