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Page:Sand - La Filleule.djvu/34

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Ma sollicitude parut très-puérile à Roque, qui trouvait sage que l’enfant, destiné à ne jamais connaître les douceurs de la civilisation, s’habituât, dès le premier jour, à s’ébattre nu dans une sorte de paillasson.

On appela d’en bas la mère Floche.

— Ah ! mes bons messieurs, s’écria-t-elle, je ne sais où donner de la tête. Et mon homme qui n’a pas encore soupé ! Laissez-moi poser cette pauvre petite sur votre lit pour un moment ; je reviens la chercher.

Elle sortit sur un second appel de son mari, qui paraissait s’impatienter, et nous restâmes chargés de la garde de l’enfant.

Elle est bonne ! me dit Edmond en style d’écolier (l’aventure est le mot sous-entendu de cette locution). N’aurais-tu pas appris, incidemment, l’art de nourrir les marmots ?

L’enfant criait ; nous imaginâmes de lui donner de l’eau sucrée.

— Tiens, ça boit ! disait Roque émerveillé.

L’enfant s’endormit sur mes genoux. Roque reprit sa dissertation sur le déluge, tout en fumant son cigare.

Cependant, au bruit et au mouvement qui se faisaient au rez-de-chaussée avait succédé un silence complet.

— Je crois, Dieu me pardonne, dis-je à mon ami en l’interrompant, que tout le monde, vaincu par la fatigue, s’est endormi en bas, et que nous allons être obligés de bercer cette sorte d’être toute la nuit.

— Voyons ! voyons ! donne-moi ça, répondit Roque en voulant prendre l’enfant. Je vais le reporter à sa mère.

— Va voir ce qui se passe, lui dis-je, et envoie-moi la mère Floche.

Roque descendit. Je restai seul avec l’enfant, sans trop m’apercevoir qu’il était sur mes genoux, le soutenant instinc-