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Page:Sand - La Ville noire.djvu/64

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la ville noire.

son langage clair et correct, à ses manières honnêtes et à sa figure sympathique, de la clientèle des détaillants. Il voyait du pays, il respirait à pleins poumons l’air des champs fertiles, lui enfermé depuis douze ans dans le noir abîme du Val-d’Enfer ! Il acquérait des connaissances, il se faisait apprécier. Son instruction et sa probité le rendaient en peu d’années un homme important, considéré, pouvant rendre des services et s’appuyer sur un crédit toujours grandissant. Enfin il aspirait à monter, sans bien se dire où il s’arrêterait, ne se connaissant aucun mauvais désir à satisfaire, ayant surtout soif d’agir pour agir, et regrettant seulement son point de départ, le chagrin secret de Tonine, car, sans ce reproche intérieur, ses volontés et ses espérances n’avaient rien que de légitime.

Plus il regardait cette baraque du Creux-Perdu, plus il se l’appropriait dans sa pensée. Ce site effroyable, ce lieu désert lui semblait un atelier digne de son audace. — Ici je serai seul maître et seigneur chez moi ! J’aurai des ouvriers que je traiterai plus humainement que je n’ai été traité par ceux qui ont