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Page:Sand - Le Beau Laurence.djvu/99

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vint présent et un frisson passa dans nos veines. Elle le sentit vibrer autour d’elle et sa figure prit une expression que nous ne lui connaissions pas. Son irréprochable diction s’accentua par degrés, sa froide poitrine palpita, et sa voix frêle, devenue stridente, trouva des accents de détresse, de révolte et d’étouffement qui ne ressemblaient à rien de connu. Avait-elle la fièvre ? est-ce nous qui avions le délire ? Elle nous fit verser de véritables larmes, et cette émotion, nécessaire sans doute à des gens qui s’étaient efforcé de rire jusque dans les affres de la mort, nous emporta jusqu’au délire. On applaudit, on cria, on se jeta dans les bras les uns des autres, on baisa les mains d’Impéria en lui disant qu’elle était sublime. On fit plus de bruit qu’une salle tout entière. Le prince fut oublié comme s’il n’eût jamais existé.

Quand je me souvins de lui, je vis qu’il nous regardait avec étonnement ; sans doute il nous prenait pour des fous, mais c’était encore un spectacle. Il croyait étudier la vie intime des comédiens, dont les gens du monde sont prodigieusement curieux, et qu’il ne saisissait là que dans un moment tout exceptionnel.