Aller au contenu

Page:Sand - Le Château des désertes - Les Mississipiens, Lévy, 1877.djvu/62

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fatigué pour avoir essayé de dormir ? J’ai fait mieux que vous ; j’ai passé la nuit dehors. Quand on est excité, il faut s’exciter davantage ; c’est le moyen d’en finir plus vite.

— Fi ! Célio, dis-je en riant, vous me scandalisez.

— Il n’y a pas de quoi, reprit-il, car j’ai passé la nuit sagement à causer et à écrire avec la plus honnête des femmes.

— Qui ? mademoiselle Boccaferri ?

— Eh ! pourquoi devinez-vous ? Est-ce que…. mais il serait trop tard, elle est partie.

— Partie !

— Ah ! vous pâlissez ? Tiens, tiens ! je ne m’étais pas aperçu de cela ; il est vrai que j’étais tout plongé en moi-même hier soir. Mais écoutez : en vous quittant cette nuit, j’étais de fort mauvaise humeur contre vous. J’aurais causé encore deux heures avec plaisir, et vous me disiez d’aller me reposer, ce qui voulait dire que vous aviez assez de moi. Résolu à causer jusqu’au grand jour, n’importe avec qui, j’allai droit chez le vieux Boccaferri. Je sais qu’il ne dort jamais de manière, même quand il a bu, à ne pas s’éveiller tout d’un coup le plus honnêtement du monde et parfaitement lucide. Je vois de la lumière à sa fenêtre, je frappe, je le trouve debout causant avec sa fille. Ils accourent à moi, m’embrassent et me montrent une lettre qui était arrivée chez eux pendant la soirée et qu’ils venaient d’ouvrir en rentrant. Ce que contenait cette lettre, je ne puis vous le dire, vous le saurez plus tard ; c’est un secret important pour eux, et j’ai donné ma parole de n’en parler à qui que ce soit. Je les ai aidés à faire leurs paquets ; je me suis chargé d’arranger ici leurs affaires avec le théâtre ; j’ai causé des miennes avec Cécilia, pendant que le vieux allait chercher une voiture. Bref, il y a une heure que je les y ai