Aller au contenu

Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/269

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

passer avant vous ; c’est pour une chose qui presse, un service à rendre à de pauvres gens qui ne veulent pas être connus.

À peine seule avec la marquise, elle s’excusa de lui venir parler des pauvres dans ses jours de liesse. — C’est au contraire le jour des pauvres, répondit la généreuse dame ; parlez. Une de mes grandes joies sera de pouvoir à présent faire plus de bien que je ne le pouvais naguère.

Léonie avait son prétexte tout préparé. Quand elle eut présenté sa requête et porté la marquise sur sa liste de souscription, elle feignit de vouloir s’en aller bien vite, pour se faire un peu retenir. Inutile de rapporter les habiles détours par lesquels sa perversité sut amener le point intéressant de la conversation. Ces infamies de cœur, malheureusement trop communes, sont dans la mémoire de tous ceux qui en ont ressenti les effets cruels, et ceux-là sont bien rares qui ont été oubliés par la calomnie.

On parla naturellement du bonheur de Gaëtan et des perfections de la jeune duchesse. — Ce que j’aime le plus en elle, dit Léonie, c’est qu’elle ne soit jalouse de personne, pas même de… Ah ! pardon, le nom allait m’échapper !

Elle y revint par trois fois, refusant toujours de dire ce nom qui commençait à inquiéter la marquise. Enfin il lui échappa, et ce nom, c’était celui de Caroline.

Elle se hâta de le reprendre, de dire que la langue lui avait fourché ; mais en dix minutes le coup n’en