Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/340

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quoi ! lui dit-elle en lui parlant bien bas, je le sais malade et je vais le laisser ainsi ! Non, j’étais folle ! je reste.

— Ah ! voilà ce que Peyraque ne souffrira jamais, répondit Justine. Peyraque est dur ; mais que veux-tu ? Il a peut-être raison. Si vous vous apitoyez, vous ne pourrez plus vous quitter. Et alors… Je sais bien que vous ne ferez certainement rien de mal, mais la mère… Et puis ce qu’on dira !

Caroline n’écoutait pas : Peyraque monta, lui prit la main d’un air d’autorité et la fit descendre. Elle avait mis son pauvre cœur sous la gouverne du protestant des Cévennes ; il n’y avait plus moyen de le reprendre.

Il la conduisit dehors vers la carriole et y jeta son paquet. En ce moment, Caroline qui avait réellement perdu la tête lui échappa, s’élança par la porte de derrière dans la maison, et vit M. de Villemer, qui avait le dos tourné. Elle n’alla pas plus loin, la raison lui revint. Et puis son attitude la rassura un peu. Il n’avait pas l’air brisé qu’elle lui avait vu à la veille de sa crise. Il était assis devant le feu et lisait dans la bible de Peyraque. La petite lampe de fer accrochée au manteau de la cheminée éclairait ses cheveux noirs, ondulés comme ceux de son fils, et le coin de sa tempe, toujours pure et ferme. M. de Villemer souffrait beaucoup sans doute, mais il voulait vivre : il n’avait pas perdu l’espérance.

— Me voilà, dit Caroline en retournant vers Pey-