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PROCOPE LE GRAND.

concile. La vie de Martin V avait été employée à corrompre et à désunir ces assemblées ; Eugène IV continuait ce travail, mais avec moins d’habileté, et déjà il avait prononcé la dissolution du concile de Bâle, sous le prétexte que la moitié de la population de cette ville était hérétique, et que les doctrines de Wicklel et de Huss y trouveraient trop d’appui, Mais ce pontife rencontrait, dans son légat Julien, une résistance énergique, et, dans l’empereur Sigismond, un ennemi mal réconcilié, qui venait lui demander le couronne, le glaive à la main. « Quand vous devriez, écrivait Julien au saint-père, perdre la vie à l’occasion de ce concile, il vaudrait mieux mourir que de souffrir sur vous une tache ineffaçable, et de donner lieu à des scandales dont vous rendrez compte à Dieu. » Eugène IV voyait sa puissance ébranlée, et se flattait de la rétablir par l’intrigue, en gagnant du temps. D’un côté, il demandait au concile délai sur délai avant de répondre à la sommation d’y comparaître ou de s’y faire représenter ; de l’autre, il retardait le couronnement de Sigismond, et suscitait contre lui les princes italiens, ses auxiliaires, pour l’empêcher d’entrer en Italie. L’Empereur, attaqué près de Milan par les Florentins et les Vénitiens réunis, fut plus heureux contre eux que contre les Bohémiens. Il les battit dos et ventre, dit notre auteur. Les Vénitiens tentèrent de l’empoisonner ; mais, étant sorti vainqueur de tous ces périls, il traversa l’Italie avec ses Allemands et ses Hongrois, que les Italiens traitaient de barbares, et alla attendre à Sienne le bon plaisir du pape, qui céda enfin au bout de six mois, et le couronna Auguste, c’est-à-dire empereur, selon l’institution de Grégoire V. Jusque-là Sigismond n’était que César, ou roi des Romains. Néanmoins les Allemands et les Slaves lui donnaient le titre d’empereur par anticipation.