Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/82

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Roger ; mais il était charmant, et ce charme augmentait à mesure qu’on l’observait. Sa physionomie, sobre d’expression, avait des finesses inouïes d’affection et de sensibilité. Il était si sympathique et si distingué, même en conservant son parler et ses allures rustiques, que je comprenais l’amour de Charlotte et l’orgueil de madame de Flamarande.

Il échappa bientôt à mon attention. Michelin avait un grand dîner. Tandis qu’au donjon on se contentait d’un lunch à offrir aux personnes qui avaient pris la peine de venir, tous les invités de la ferme, et ils étaient nombreux, comptaient sur le solide repas d’usage. Suzanne et ses filles préparaient tout avec activité, Ambroise mettait le couvert dans une vaste grange, et Espérance, affublé d’un tablier blanc, portait gaiement les soupières et les plats fumants avec Charlotte. Les convives arrivaient, amenés par Michelin. J’allais aussi me mettre à table, Espérance avait dressé mon siége à la place d’honneur et s’apprêtait à me servir lorsque Roger entra, répondit gracieusement aux saluts qu’on lui adressait et vint à moi. Je me levai, il me fit rasseoir, et, se penchant à mon oreille :

— Déjeune tranquillement, me dit-il, mais désigne-moi le jeune homme qui a eu un accident dans la chapelle.

Je ne pus cacher un moment d’émotion.

— Que lui voulez-vous donc ?