Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/165

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femme se fait gloire de son infériorité intellectuelle pour se rabattre sur l’orgueil de sa beauté, elle fait bon marché d’elle-même, elle se range parmi les animaux domestiques, elle devient un charmant oiseau, bon à mettre en cage. On lui sait gré de s’y tenir tranquille, on lui siffle un air, on lui fait une caresse en passant, on le regarde sautiller avec grâce, mais on passe vite à des amusements plus sérieux, et il me semble, ne vous en déplaise, que telles sont et telles seront toujours vos relations de cœur avec M. Brudnel : vous avez voulu lier son existence à la vôtre, vous avez tout accepté, même de réelles souffrances. Je suis médecin, je vois, je sais que le manque d’expansion a dû coûter à une organisation comme la vôtre, et vous croyez avoir assez fait pour être associée à la vie d’un homme supérieur. Eh bien, non, vous vous êtes trompée, c’est trop peu. Jamais sir Richard ne passera plus de deux heures par jour avec vous, et ce sera même un grand sacrifice qu’il vous fera, car il a de l’expérience et n’ignore pas qu’il existe des femmes avec lesquelles on peut penser tout haut, vivre de tout son être, et ne jamais être forcé de descendre au dessous de soi-même.

Manuela rêva tristement, puis elle dit :

— Vous croyez qu’il a connu de ces femmes-là ?