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Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/271

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Elle a été lente à trouver son chemin, elle redoute le médiocre, en rien elle ne s’accommoderait d’un pis-aller. Cette musique qui l’a enfin passionnée, elle l’a abordée en tremblant. À la fois ambitieuse et modeste, elle craignait de n’y pas saisir son idéal. Timide, elle a bien longtemps douté d’elle-même. Il a fallu que l’admiration des autres la rassurât, et je dois dire que celle de sir Richard a été nécessaire pour lui donner tout à fait conscience d’elle-même. Elle a vu qu’il était un juge compétent ; elle a, depuis ce jour, fermé son piano, comme pour savourer sa victoire. Et ne va pas t’imaginer que Jeanne pense à se produire en public. Elle écrit ses compositions, qui ne verront peut-être, jamais le jour, car on n’édite avec succès que les noms célèbres, et Jeanne ne voudrait pas devenir célèbre ostensiblement. Elle ne consentira jamais à payer de sa personne. Elle ne désire pas la richesse, notre humble aisance lui suffit ; je crois même que la pauvreté lui serait peu sensible. Tout le problème à résoudre pour elle, c’est de trouver l’expression des pensées musicales qui l’oppressent. Si elle a encore des jours de rêverie et de silence, c’est que la muse se débat en elle. Quand elle a trouvé sous ses doigts le vrai sens de son rêve enthousiaste, elle renaît, elle s’épanouit, elle est heureuse. Il m’a