Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/303

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voies encore, fais ce que je te demande, remonte chez toi et dors, à moins que tu ne sois encore jaloux de Manuela Perez et que tu ne veuilles t’opposer à son mariage ?

— Tu sais bien que j’ai des idées tout à fait différentes ; mais je trouve bizarre et, permets-moi de te le dire, je trouve révoltant que M. Brudnel vienne ici avec mystère comme un amoureux espagnol… Enfin, je trouve inadmissible et intolérable qu’il embrasse Jeanne comme si elle était sa fille ou sa sœur. Que signifie cette soudaine intimité ? Il vient donc souvent ? C’est sans doute lui que j’ai aperçu déjà…

— Laisse-nous donc tranquilles avec tes soupçons ! dit ma mère en riant, cela n’est pas de mise chez nous. Va-t’en ! obéissez à maman, monsieur.

Elle m’embrassa tendrement et descendit, me laissant stupéfait.

Je restai où j’étais, dans la chambre de ma mère, les coudes appuyés sur la fenêtre que j’ouvris brusquement pour ne pas étouffer, la tête dans mes mains, en proie à une agitation inconcevable.

Que se passait-il en moi ? pourquoi cette sorte de rage ? Je haïssais sir Richard de toutes les puissances de mon être. Jamais je n’avais été jaloux de Manuela comme je l’étais de Jeanne.