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Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/229

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de mademoiselle La Quintinie. Ne vous en prenez qu’à vous-même, qui avez travaillé à la détacher de l’Église.

— À la bonne heure, monsieur ! J’aime mieux tout savoir.

— Vous voulez donc que je déclare la guerre à votre amour ?

— Oui. Puisque c’est la guerre, combattons face à face ! Il m’en coûtait de vous accuser d’une trahison réfléchie.

— Oh ! s’écria-t-il avec véhémence, m’avez-vous cru un instant capable de vous calomnier, Émile, de rabaisser votre caractère et celui de votre père ? S’il en est ainsi, je suis bien malheureux. »

Il pleurait de véritables larmes. Je fus ému.

« Non, monsieur, lui dis-je. Si j’ai été tenté d’y croire, je m’en suis défendu, et, devant ces larmes que je vous vois répandre, je sens que je dois m’abstenir d’un pareil soupçon.

— Merci, reprit-il en me serrant dans ses bras ; merci, mon enfant ! Ah ! je le vois bien, vous êtes un cœur généreux et une noble nature ! Vous séparer de celle que vous aimez est un calice que je partage avec vous, vous le voyez. Mon âme est brisée du coup que je vous porte ! Je la plains elle-même, cette jeune fille… »

Ici les sanglots l’étouffèrent, comme si Lucie eût été pour lui l’objet d’une affection encore plus vive que celle qu’il m’exprimait à moi-même ; mais il fit un effort pour vaincre cette pitié, et il continua :

« Il faut la sauver à tout prix, dût-elle en mourir ! Qu’elle meure en paix avec Dieu et revive dans sa gloire plutôt que de vivre dans le péché et de végéter dans la mort ! — À présent, Émile, reprit-il après un moment de silence et de recueillement, mon devoir m’oblige de vous