Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/304

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joignant les mains. Encore cette menace de duel ! c’est horrible, et je meurs de tout cela, moi aussi.

La douleur de ma pauvre tante me fit rentrer en moi-même. Je lui promis de considérer Montroger comme un enfant et de le traiter en conséquence, sans souffrir qu’Erneste fût compromise par l’éclat de mon ressentiment ; mais il fallait que la jeune fille reçût une leçon, et nous convînmes de la lui infliger. En effet, dès le lendemain, ma tante lui montra sa lettre, et lui déclara que je comptais aller demander raison à M. de Montroger de sa conduite envers nous. Erneste surmonta vite un instant d’effroi, et, sous le coup du dépit, elle voulut s’expliquer avec moi devant sa mère.

— Vous êtes bien content d’avoir trouvé ce prétexte, me dit-elle, pour vous défaire d’un rival qui vous gêne ! Allez donc, mais je vous déclare que Célie va être instruite de ce qui se passe, et c’est sur elle que je compte pour vous retenir et pour m’absoudre. Où est donc mon crime ? Vous plaît-il de me le dire ? J’ai eu plus d’indulgence et de bonté que vous. Je n’ai pas voulu voir devenir fou d’inquiétude un malheureux que vous repoussiez trop cruellement. Quand Célie saura le chagrin qu’il a eu et que vous lui cachez, elle le plaindra et m’approuvera d’avoir adouci vos rigueurs. Vous-même, qui vouliez à tout prix assurer le repos de la malade, vous devriez me savoir gré d’avoir réussi à faire tenir Montroger tranquille. Croyez-vous que sans moi il n’eût pas forcé toutes vos consignes et au besoin enfoncé les portes ? On me doit ici plus de reconnaissance qu’à personne, et vous pouvez m’espionner, me blesser, m’enfermer comme une petite fille coupable ; ma conscience me dira tou-