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Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/188

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et par quel moyen on pourrait essayer de lui faire comprendre qu’il était de son intérêt d’y consentir, sans lui révéler une situation terrible.

— Attendez, reprit M.. Sylvestre, je ne vous ai pas tout dit. Mademoiselle Vallier, qui s’est prise d’amitié pour Jeanne, prétend que Jeanne est très-romanesque. Il n’y aurait pas de mal à cela. Son grand-père disparu était pour elle, à ce qu’il parait, un personnage légendaire qu’elle rêvait de connaître, et qu’elle a été enchantée de retrouver ermite sans être forcée d’aller le chercher dans l’île de Pathmos. Qui sait si elle ne serait pas fière de le ramener à elle et de l’arracher à la solitude ? Si mademoiselle Vallier ne se trompe pas, elle ferait beaucoup de sacrifices à ma bizarrerie pour atteindre ce but, et même elle accepterait l’idée d’un voyage avec moi. Ce serait à moi, durant ce voyage, de faire naître les circonstances qui pourraient fixer son cœur et sa destinée. Savez-vous que cette fille est sauvée si l’amour me vient en aide ?… Oh ! l’amour fait des miracles ! Il y a encore là-bas, en Suisse, en Allemagne, des jeunes gens qui croient à cela, qui ont de la délicatesse, de la fermeté, et qui se chargeraient bien de débarrasser Jeanne de sa mère sans qu’elle comprit trop pourquoi. J’en ai connu de ces amoureux délicats ; il y en a encore, allez ? Vous avez beau dire que la jeunesse d’aujourd’hui est revenue de tout cela, c’est possible pour quelques milliers de jeunes esprits forts qui tiennent à Paris le dé de la polémique et de la discussion ; mais, en dehors de votre Babylone, il y a des cœurs naïfs, et on les compte par millions. Il y en aura toujours, vous aurez beau faire !

— Que Dieu vous entende, répondis-je, puisque vous avez besoin qu’il y en ait ! Mais je persiste à