Aller au contenu

Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/116

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

intervalles, vous ne partirez pas demain sans que je vous voie.

— C’est donc demain que je quitte Monsieur ?

— À mon grand regret, certainement, monsieur Crésus ! mais j’ai enfin trouvé, dans votre pays de sauvages, chevaux, domestique et voiture, et il est temps que je vous rende à vos fonctions auprès de mademoiselle Éveline, qui a bien voulu se priver de vous pendant huit jours.

— Oh ! pardié ! elle peut bien se passer de moi tout le restant de sa vie, objecta philosophiquement Crésus. Elle a bien d’autres laquais que moi à ses ordres, et j’ai plus besoin d’elle qu’elle n’a besoin de moi.

— Ne rendez pas notre séparation trop déchirante, monsieur Crésus, en nous montrant les trésors de votre esprit, dit Thierray, et, puisqu’on n’a plus rien à vous dire, reprenez votre distance à douze têtes de cheval en arrière ; surtout comptez bien et qu’il n’y en ait pas une de moins.

— Sont-ils bêtes ! pensa Crésus. C’est égal, ça paye bien.

Et il opéra son mouvement de retraite à l’arrière-garde.

— Il fait presque froid ce soir, dit Thierray.

— Non, c’est la campagne qui devient triste, répondit Flavien.

Il reprit le trot, et Thierray le suivit.

— Décidément, mon cher, dit Thierray, lorsqu’au bout de dix minutes ils se remirent au pas pour traverser un marécage, je ne suis pas né cavalier, le trot me fatigue. Je n’aime que le pas et le galop.

— Mais, mon très-cher, nous irons comme tu voudras. Règle l’allure, je te suivrai. Est-ce que par hasard tu te gênes avec moi ?