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Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/29

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marguillier de sa fabrique, bon époux, bon père… Avec tout cela, est-ce un honnête homme ?

— Un très-honnête homme, et même un homme d’esprit.

— Et de cœur, comme sa femme ?

— Et de cœur, J’en réponds, bien que je ne le connaisse que depuis peu de temps.

— Et sa femme, depuis quand ?

— Sa femme ? dit Thierray en comptant sur ses doigts avec enjouement. En tout, je l’ai vue trois fois ; quant au mari, nous nous étions rencontrés chez un ami commun, je lui ai plu ; il m’a plu aussi, tant que je n’ai pas vu sa femme. Il m’a présenté à elle, et dès lors j’ai subi et supporté les avances du mari, sans avoir cependant le droit de me moquer de lui, car je te répète, et très-sérieusement, qu’il a les manières et la réputation d’un galant homme. Pourquoi diable est-il le mari d’Olympe ? Ce n’est pas ma faute, à moi, si elle m’a frappé l’imagination dès le premier abord. Figure-toi une femme pâle, d’une couleur superbe, une attitude austère et voluptueuse, des manières accueillantes et glacées, un sourire plein de charme et de dédain, tout ce qui attire et repousse, tout ce qui excite, tout ce qui effraye, tout ce qui provoque, tout ce qui rebute, une énigme vivante ! Est-ce que cela est vulgaire et facile à rencontrer ? Il y a dix ans que je cherchais ce type. Je le tiens, je m’en empare, je décrète que je vaincrai le sphinx ; je cultive le mari, je m’en fais adorer ; je promets d’aller chasser avec lui dans le Nivernais au temps des vacances de la Chambre. Sa femme, qui n’était venue que pour quinze jours à Paris, et qui disait avoir hâte de retourner auprès de ses enfants, part en me jetant un regard étrange, et en me disant qu’elle compte sur moi pour le mois de septembre.