Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/313

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ce soin avec un désintéressement admirable, et Olympe, ne comprenant pas sa souffrance, tant elle était vaincue par la sienne propre, s’était habituée à lui ouvrir son âme comme au meilleur ami qu’elle eût, après son époux.

Depuis quelques jours, Olympe était plus triste, plus effrayée qu’elle ne l’avait été de sa vie. Elle voyait son mari agité et préoccupé, partagé entre des accès d’idolâtrie pour elle et de subites froideurs qu’elle prenait encore pour l’effet d’un chagrin étranger à leur amour. Amédée lui manquait. Il lui semblait que cet ami délicat et ingénieux eût arraché à Dutertre l’aveu de son anxiété, ou que, du moins, il lui eût suggéré, à elle, le moyen de la faire cesser.

Lorsque Flavien la vit apparaître au seuil de cette chaumière, il fut frappé de l’altération de ses traits. Habituellement pâle, car elle était de ces organisations lymphatiques et bilieuses qui produisent les plus persévérantes et les plus lucides intelligences, elle avait, pour la première fois, les lèvres entièrement décolorées. Les plans de son visage conservaient la rondeur qui s’allie à la fermeté dans les beaux types italiens ; mais les narines, en se resserrant et en rendant son profil plus fin, attestaient l’invasion d’une maladie chronique. Enfin, ses yeux légèrement cerclés d’une teinte bleuâtre avaient pris un développement qui la rendait plus belle, mais qu’un diagnosticien plus habile eût observé avec inquiétude.

Flavien jugea qu’elle avait eu quelque grand chagrin depuis qu’il ne l’avait vue. Une circonstance que nous avons omise dans ce récit, parce qu’elle trouvera sa place plus tard, le préserva de la vanité de croire qu’il fût pour quelque chose dans ce chagrin. Il n’en fut pas moins touché, car cette altération l’embellissait encore à ses