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Page:Sand - Narcisse, 1884.djvu/240

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taine vivacité, ce n’est point là mon avis ! Vous voulez que, pendant trois jours, je laisse cet homme compter sur mon idiotisme ? Non, non, pas pendant une heure de plus.

En parlant ainsi, elle mit au bas de la lettre d’Albany ce peu de mots :

« Vu et désapprouvé.

« Juliette d’Estorade. »

Puis elle la plaça sous enveloppe, cacheta et écrivit l’adresse d’une main ferme. Elle lui renvoyait purement et simplement sa déclaration d’amour sans daigner lui expliquer les motifs de son dédain.

Je m’abstins de toute réflexion. J’avais promis ! Ma réserve impatienta Juliette, et je la trouvai plus vive et plus énergique que je ne l’avais vue.

— En vérité, dit-elle, je ne vous croyais pas si impartial envers moi. On ne doit pas l’être à ce point avec les gens qu’on aime ! Vous semblez ne pas vous soucier de l’injure qui m’est faite.

— Ne dites pas de ces choses-là devant Narcisse, lui répondis-je. Je crains fort qu’il ne perde patience avec l’homme qui entre encore la nuit dans son jardin.

— Ah ! s’écria Juliette émue ; Narcisse l’a vu ? Narcisse sait tout cela ? Et que dit-il, lui ? Pense-t-il qu’il faille ne pas m’influencer, mais attendre trois jours ma réponse ?