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Page:Sand - Nouvelles (1867).djvu/329

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dignité que le temps, qui sanctifie les affections, devait nécessairement apporter ; mais le cœur de cette femme infortunée était aussi jeune que celui de Sarah. Elle devint presque folle de douleur et d’incertitude : devait-elle laisser sa nièce courir les dangers d’une passion partagée ? devait-elle favoriser un mariage qui lui semblait contraire à toute délicatesse d’esprit et de mœurs ? Mais pouvait-elle s’y opposer, si Olivier et Sarah le désiraient tous deux ? Cependant il fallait s’expliquer, sortir de ces perplexités, interroger Olivier sur ses intentions : mais à quel titre ? Était-ce l’amante désespérée d’Olivier, ou la mère prudente de Sarah, qui devait provoquer un aveu aussi difficile à faire pour lui ?

Un soir, Olivier parla d’un voyage de quelques jours qu’il allait faire à Lyon ; lady Mowbray, dans la position désespérée où elle était réduite, accepta cette nouvelle avec joie, comme un répit accordé à ses souffrances. Le lendemain, Olivier fit seller son cheval pour aller à Genève, où il devait prendre la poste, il vint à l’entrée du salon prendre congé des dames : Sarah, dont il baisa la main pour la première fois de sa vie, fut si troublée, qu’elle n’osa pas même lever les yeux sur lui ; Metella, au contraire, l’observait attentivement ; il était fort pâle, et calme comme un homme qui accomplit courageusement un devoir rigoureux. Il embrassa lady Mowbray, et alors sa force parut l’abandonner ; des larmes roulèrent dans ses yeux ; sa main trembla convulsivement en lui glissant une lettre humide…

Il se précipita dehors, monta à cheval et partit au galop. Metella resta sur le perron jusqu’à ce qu’elle n’entendît plus les pas de son cheval. Alors elle mit une main sur son cœur, pressa le billet de l’autre, et comprit que tout était fini pour elle.

Elle rentra dans le salon. Sarah, penchée sur sa bro-