Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/125

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teau, la chaumière, le presbytère, le cabaret ! tout cela est à moi. Je n’ai qu’à choisir, et partout je me trouve bien.

LE GENDARME.

Oui, je sais bien que partout on vous a hébergé gratis jusqu’à présent. Il le fallait bien, il n’y avait pas de dépôt ! mais, à présent qu’il y en a un, on ne doit plus vous recevoir.

LE MENDIANT.

Comment ! c’est défendu à présent de donner l’hospitalité aux pauvres ? je n’ai plus droit au souper et au couvert chez mes connaissances, chez mes amis ? car j’ai des amis, moi ; tout le monde m’aime dans mon pays, et tout le monde me plaint ; et nulle part on ne me refuse ce qui m’est nécessaire. Je suis discret, sobre ; je me contente de peu. Je ne mets pas mes hôtes en dépense. Mon morceau de pain d’orge chez le paysan, mon écuelle de soupe chez le métayer, mon gros sou au château, mon demi-verre de vin au cabaret, et cela, une fois par quinzaine chez chacun, à qui cela fait-il tort ? ça fait plaisir à tout le monde, au contraire de me donner. Ils sont si habitués à moi ! ils me regretteront, les braves gens !

LE GENDARME.

Ça ne me regarde pas, père Va-tout-seul. Allons, en route pour la ville !

LE MENDIANT.

Je veux bien marcher un peu à côté de toi. Ça ne m’humilie pas, je ne suis pas fier ; mais tu me laisseras partir quand tu m’auras entendu : je te con--