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Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/154

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premier ordre. N’était-ce pas assez ? non, ce n’eût pas été encore assez pour écrire, un tel livre, et la gloire de l’historien est à plus haut prix.

L’histoire s’élabore de siècle en siècle à l’aide de matériaux divers, plus ou moins purs, plus ou moins grossiers. La plupart de ces matériaux n’ont d’autre mérite intrinsèque que celui de la pierre et du métal employés dans les constructions ; mais ce n’en est pas moins une valeur réelle, et tous ces éléments se régularisent sous la main puissante de l’historien appelé à créer un monument. Ils se transforment sous le souffle de son intelligence, sagacité ou génie. Dans cette œuvre toute morale et philosophique, l’architecte est secondé par un rare bonheur attaché à la nature même de son sujet. C’est que les plus méchants matériaux sont parfois les plus utiles, c’est que réellement rien n’est insignifiant et nul pour l’historien qui sent et porte en lui la lumière. La vérité n’est jamais plus éclatante pour lui que dans ces pages où il surprend de flagrants mensonges. Quelle instruction ne renferme pas les plus infâmes libelles ! Combien de grands noms, combien de grandes idées, ne sont venus à nous qu’à travers des sentences de mort et d’infamie prononcées arbitrairement sur eux ! Combien les passions mauvaises et fanatiques n’ont-elles pas pris soin de se révéler elles-mêmes dans leurs fougueuses déclamations, dans leurs féroces calomnies ! Combien de martyrs de l’opinion n’ont-ils pas été réhabilités seulement par la martyre de la persécution ? La plume qui diffame et injurie l’innocence