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Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/45

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qui, aux fêtes de la patrie, devrait marcher derrière le prêtre dans les solennités civiques, c’est dans notre société actuelle un manœuvre abaissé aux plus pénibles, aux plus viles fonctions ! Et, par le plus hideux rapprochement qui se puisse offrir à la pensée, c’est dans des cavernes infectes, c’est à la vapeur fétide des latrines, c’est presque avec l’ordure la plus immonde que ces spectres vivants, comme les appelle Fauteur de la lettre, pétrissent le pain, l’aliment premier de notre vie physique !

Ainsi la spéculation a tout envahi, jusqu’au pain que nous mangeons. Pétri matériellement de sueurs et de larmes, il coûte la vie chaque jour à des centaines d’ouvriers ! Provinciaux, qui courez par milliers pour contempler chaque année les merveilles de la grande cité, vous vous êtes sans doute arrêtés devant ces boutiques que vous dépeint en deux mots vrais notre prolétaire. Des dorures, des fleurs, des peintures qui rappellent celles d’Herculanum et tout le luxe inutile et insensé de l’empire romain à la veille de sa décadence, de grands panneaux de glaces, un comptoir de marbre orné de bronzes dorés, qui ressemble à un autel, voilà ce qui a frappé vos regards éblouis. Mais vous n’êtes pas descendus dans cette sentine de l’opulente maison où des malheureux, plus esclaves du salaire que ne l’ont jamais été les esclaves de l’antique conquête ou les serfs de la féodalité, s’épuisent et meurent sans qu’une seule de leurs plaintes puisse monter jusqu’à vous ! Le métier par lui-même est des plus rudes, et vous savez que le peuple de Paris, toujours